Madame la Ministre, Monsieur l’Ambassadeur, très honorables invités, chers amis de METAdrasi, Mesdames, Messieurs,
C’est un grand honneur d’être ici aujourd’hui, et j’aimerais remercier très chaleureusement la France de m’attribuer la Légion d’honneur, même si je ne sais pas très bien pourquoi cette magnifique distinction m’échoit… Est-ce parce que je suis opiniâtre, voire têtue, au point de ne jamais accepter le « non » comme réponse et, peut-être même, devenir fatigante ? Ou bien parce que, comme me disent certains, je vis « dans mon monde » ?... À ce propos, je commence à considérer le fait de vivre dans « mon monde » comme un compliment, car il faut bien parfois avoir un autre monde dans sa tête, pour remplacer celui-ci !
Je ne peux oublier la première fois il y a deux ans où, avec d’autres ONG grecques, je me suis trouvée à l’Ambassade de France. Au lieu de parler de METAdrasi, j’ai présenté avec ma fougue habituelle (dans des termes peu diplomatiques) la situation tragique des mineurs non accompagnés sur les îles, notamment à Chios, et de la nécessité de créer un Centre d’accueil. En rentrant et en me remémorant la rencontre, je me suis dit que plus jamais l’Ambassade ne nous recevrait… Mais peu après, j’ai reçu un coup de fil du « magicien » Monsieur Boulay, m’annonçant que l’Ambassade de France envisageait d’appuyer notre action. Et c’est ainsi qu’un miracle a eu lieu : le premier et toujours le seul centre d’accueil pour enfants non accompagnés a vu le jour à Chios. Ce Centre fonctionne, encore aujourd’hui, grâce à l’appui de la fondation Stavros Niarchos, qui a repris le flambeau du soutien financier.
Permettez-moi de vous exprimer ma plus profonde gratitude pour votre confiance dans ce rêve qui, grâce à vous, est devenu réalité : des dizaines d’enfants ont pu trouver un environnement sûr, échappant aux conditions de « hot spot » et à toutes sortes de dangers. Certains de ces enfants sont à présent en Allemagne, en Suède, en Autriche et d’autres pays de l’UE. Ils deviendront, d’ici quelques années, des citoyens européens. Et j’aimerais croire que leurs premiers pas sur le sol européen, à Chios, les inciteront à contribuer à l’idéal d’un « futur commun ».
Mesdames et Messieurs, chers ami(e)s, l’humanisme n’appartient à personne.
À part l’équipe de METAdrasi, qui fait de son mieux tous les jours sur le terrain, dans des conditions très difficiles, sont réunis ici de nombreux soutiens : du domaine de l’art et de la culture, de l’entreprise, de la diplomatie, de l’éducation ; aux côtés de mères qui ont hébergé des enfants non accompagnés. Beaucoup d’autres personnes, d’horizons très différents, n’ont pas pu venir mais ont contribué, à leur manière, au but commun : aider et protéger d’autres êtres humains qui se trouvent sur le sol européen, en Grèce, pour tenter d’échapper à la violence, la persécution, aux conflits, à l’intolérance et à la pauvreté.
Je dédie cette Légion d’honneur à toutes ces personnes, ainsi qu’à mon amie d’études, Ismène, philhellène et activiste authentique, qui avec mon grand père m’ont tant appris sur la France.
Mais je serais injuste de ne pas remercier du fond de mon cœur, pour son soutien, Monsieur l’Ambassadeur, un homme extraordinaire, d’ouverture et d’humour.
Pour finir, j’aimerais partager avec vous, les mots d’un de vos grands poètes, Paul Eluard, dans ses derniers poèmes d’amour :
« Les hommes sont faits pour s’entendre
Pour se comprendre, pour s’aimer
Ont des enfants qui deviendront pères des hommes
Qui réinventeront les hommes
Et la nature et leur patrie
Celle de tous les hommes
Celle de tous les temps ».
Je vous remercie, encore une fois, pour l’immense honneur qui m’a été fait aujourd’hui.